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Page:Stevenson - Enlevé (trad. Varlet), 1932.djvu/137

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passa de main en main ; et les trois hommes étaient fort émus par ce qu’ils avaient bu, avant que Robin songeât à s’en retourner.


Fin de la fuite : nous passons le Forth


Le mois d’août, comme je l’ai dit, n’était pas encore terminé, mais il était fort avancé, le temps restait beau et chaud et promettait une récolte abondante et précoce, quand je fus déclaré apte à partir. Notre argent avait tant diminué qu’il importait avant tout de nous hâter ; car, faute d’arriver bientôt chez M. Rankeillor, ou s’il ne nous secourait pas dès notre arrivée, nous n’avions plus qu’à mourir de faim. Alan était persuadé, en outre, que la surveillance devait s’être beaucoup relâchée ; et la ligne du Forth, voire même le Stirling Bridge, le principal des ponts qui franchissent le fleuve, devaient être gardés avec une vigilance médiocre.

– C’est un axiome capital en matière militaire, dit-il, d’aller où l’on vous attend le moins. Notre difficulté, c’est le Forth ; vous savez le dicton : « Le Forth a bridé le sauvage Highlander. » Eh bien, si nous cherchons à contourner ce fleuve par sa source et à redescendre par Kippen ou Balfron, c’est exactement là qu’ils nous attendrons pour nous mettre le grappin dessus. Mais si nous coupons droit à ce vieux pont de Stirling, je gage mon épée qu’on nous laisse passer sans nous inquiéter.

La première nuit donc, nous nous arrêtâmes à Strathire, dans la demeure d’un Maclaren ami de Duncan, où nous couchâmes le 21 du mois, et nous en repartîmes vers la tombée de la nuit pour l’étape suivante. Le 22, nous dormîmes dans un fourré de bruyère, sur le flanc du mont Uam Var, en vue d’une harde de daims. Ces dix heures de sommeil, par une belle journée chaude et éventée, sur un terrain bien sec, furent les plus agréables que j’aie jamais goûtées. Cette nuit-là, nous rencontrâmes l’Allan Water et descendîmes son cours. En arrivant sur l’arête des hauteurs, nous découvrîmes sous nos pieds tout le Carse de Stirling, étalé comme une crêpe avec au milieu la ville et le château sur sa colline, et la lune se reflétant sur les eaux du Forth.

– Maintenant, dit Alan, si cela vous intéresse, vous revoilà dans votre pays. Nous avons franchi la limite des Highlands à la première heure ; et à présent, lorsque nous aurons passé cette eau sinueuse, nous pourrons jeter nos bonnets en l’air.

Sur l’Allan Water, tout auprès de son confluent avec le Forth, nous trouvâmes un petit îlot de sable tout plein de bardanes, de séneçons