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Page:Sulte - Histoires des Canadiens-français, 1608-1880, tome IV, 1882.djvu/98

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CHAPITRE V


Campagnes contre les Iroquois. — Projet de former des villages français sur les bords du Saint-Laurent. — Nouvelles seigneuries.



C

onduites avec précipitation, les entreprises des Français contre les Iroquois ne réussirent qu’à demi. La première campagne (hiver 1665-66) se borna à une marche en raquettes ; la seconde (automne de 1666) remplit à peu près le but désiré — mais le prestige de la France eut à souffrir du flottement des affaires militaires dans ces expéditions qui eussent dû être foudroyantes.

Les Cinq-Cantons, terrifiés, non dispersés, n’altérèrent en rien leur politique — sauf que, n’étant point les plus forts, ils recoururent à leur vieille pratique : la diplomatie. On a trop souvent répété que cette nation avait été anéantie par les soldats de Carignan : elle eût dû l’être, mais ne le fut pas. Quarante années après 1666, ses bandes bravaient encore notre colonie et semaient la terreur sur tous les territoires où paraissait le drapeau français. L’horrible situation nommée les temps héroïques se termina, il est vrai, vers 1665 ; mais, si l’époque qui suivit attira peu l’attention des historiens sous le rapport de la guerre, ce fut à cause de la diminution du péril ; autrement, on ne comprendrait pas l’erreur dans laquelle ils semblent plongés.

Les premières mesures furent excellentes. MM. de Saurel et Chambly construisirent des forts, l’un à Sorel et l’autre à Chambly (1665), et, avant que l’année fût terminée, un troisième poste s’établissait sur la rivière Richelieu, non loin de Saint-Jean aujourd’hui. On en éleva deux autres plus loin, quelques mois plus tard : à Saint-Jean même et sur une île, à l’entrée du lac Champlain. Ceux-ci étaient de trop, aussi les abandonna-t-on avant longtemps. Déjà régnait dans les esprits, au Canada, cette détermination de se porter au cœur des pays encore inoccupés par nos colons et de faire rayonner des bords du Saint-Laurent la puissance française jusqu’aux limites du monde nouveau.

Les troupes s’échelonnaient sur la ligne de la rivière Richelieu, à mesure que les forts devenaient habitables. La compagnie des Indes se montrait tiède au sujet de ces préparatifs. Ses lenteurs rappelaient l’inertie calculée des Cent-Associés. Et puis, disait-on, à quoi servira la guerre ? Les Iroquois se soumettent déjà. Leurs ambassadeurs ne respirent que la paix :