Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/107

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l’âme immatérielle, intelligente et libre, sera recueillie par son auteur ? Qui leur a dit qu’au-dessus de toutes les incertitudes, il est une certitude suprême, une vérité égale à toutes les vérités de la géométrie, c’est à savoir que, dans la mort comme dans la vie, un Dieu tout-puissant, tout juste et tout bon, préside à la destinée de sa créature, et que derrière les ombres du trépas, quoi qu’il arrive, tout sera bien, parce que tout sera l’ouvrage d’une justice et d’une bonté infinies ?

Vous reconnaissez dans ce morceau tout l’art des maîtres. Ces preuves en faveur de la raison naturelle ne sont point accumulées au hasard. Elles sont distribuées avec autant de soin que les matières d’un cours de morale. Cette énumération, qui semble négligente, est développée avec l’ordre le plus parfait. Chaque membre de phrase est un pas de la philosophie spiritualiste. C’est d’abord la distinction de l’âme et du corps  ; puis, c’est la découverte que cette âme est libre. Cette connaissance de la liberté produit l’idée du devoir  ; analysant cette idée, on y trouve d’abord celle de la justice, puis celle de la tempérance, puis celle de la charité et de tous les degrés de la charité. La religion vient alors achever la morale. La méthode prouve d’abord que Dieu existe, puis qu’il crée le monde avec sagesse, et enfin, qu’il couronne son ouvrage en faisant l’homme. En dernier lieu vient l’idée de l’immortalité de l’âme, et, pour calmer les incerti-