Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/157

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bluets, c’est le monde. La forme idéale du bluet, c’est Dieu[1].

En d’autres termes, la somme des choses qui existent, c’est le monde ; la loi, ou formule primitive, de laquelle on peut les déduire, c’est Dieu.

Traduisons ceci en bon allemand, c’est-à-dire en mauvais français. Le type du bluet subsiste seul pendant que les individus passent. On peut donc dire qu’il est leur substance. Il est la force qui les produit : on peut donc dire qu’il est leur cause. Supposons qu’il n’y ait que des bluets au monde ; comme ce type ne dépend pas d’eux et que partant il ne dépend de rien, on peut l’appeler l’inconditionnel et l’absolu. Ce type étant donné, ils sont donnés ; on peut donc les considérer comme étant contenus en lui, et dire qu’il est leur unité et leur identité. Quoique les bluets qui le manifestent se succèdent dans le temps et soient placés dans l’espace, il est, comme le triangle abstrait et comme les vérités géométriques, en dehors du temps et de l’espace. Chaque bluet qu’il produit est limité, puisqu’il est distinct de tous les autres ; pour lui, il est absolument infini, puisqu’il ne peut y avoir

  1. Selon les panthéistes, le bluet idéal, c’est Dieu. Selon les matérialistes, il n’y a pas de bluet idéal, il n’y a que des bluets particuliers. Selon les déistes, il n’y a pas de bluet idéal, mais un ouvrier intelligent et puissant, qui fabrique tous les bluets particuliers. Selon les positivistes, on ne peut connaître que les bluets particuliers, il ne faut pas s’occuper du bluet idéal.