Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/174

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des objets infinis. Les axiomes sont des propositions nécessaires, par exemple : Toute qualité suppose une substance ; tout corps est situé dans l’espace ; tout changement arrive dans le temps, etc. Les objets infinis sont, par exemple, l’espace, le temps, Dieu, etc. Ces axiomes sont bien réellement nécessaires ; non-seulement nous n’apercevons pas de cas où ils soient faux, mais nous apercevons très-nettement qu’en aucun cas ils ne peuvent être faux. Ces objets sont bien réellement infinis ; non-seulement nous ne leur découvrons pas de limite, mais nous savons très-évidemment qu’ils ne peuvent pas en avoir.

La théorie consiste à dire que ces axiomes et ces idées ne peuvent se tirer par aucune voie, addition, abstraction, combinaison, transformation, etc., des jugements et des idées que fournissent les sens et la conscience. Ainsi, mes sens me donnent l’idée d’un corps étendu ; la théorie prétend que par aucun moyen je ne pourrai tirer de cette idée la notion de l’étendue infinie qu’on appelle l’espace. Je me connais moi-même par la conscience, et je juge qu’entre autres qualités, la faculté de sentir appartient à mon être ou à ma substance ; la théorie prétend que de ce jugement particulier je ne pourrai j’amais tirer le jugement universel ou axiome : toute qualité suppose une substance.