Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/188

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nous-mêmes et des qualités qui sont nos manières d’être. Il suffira donc, pour former l’axiome de substance, de deux observations de conscience, de deux abstractions ayant pour effet de produire deux idées générales, et d’une analyse ou abstraction pratiquée sur ces deux idées. Il suffira donc, pour produire un axiome, d’employer l’expérience et l’abstraction.

Essayons. J’aperçois mes sensations par la conscience. J’aperçois par la même conscience un tout continu et persistant, dont ces sensations sont des moments isolés, et que j’appelle moi. En d’autres termes, ces sensations sont des données extraites d’une donnée plus complexe, le moi. À ce titre je les appelle qualités, et j’appelle la donnée plus complexe substance. Par abstraction, je dégage deux idées générales, l’idée de qualité, et l’idée de substance. J’analyse celle de qualité, et j’y retrouve ce que je viens d’y mettre, l’idée de substance L’axiome est formé. Récapitulez, et vous trouverez que les seules facultés qui l’ont produit sont l’expérience et l’abstraction.

Or, tous les axiomes sont des propositions de ce genre. L’attribut est toujours enfermé dans le sujet, et on l’en extrait par analyse. Kant avait cru qu’en certains cas il n’en est pas ainsi. Hégel a prouvé que les exceptions apparentes rentrent dans la règle générale. Et il faut bien qu’elles rentrent dans la