Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/194

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de considérer une certaine limite particulière. Ce sont là tous les procédés employés plus haut pour former les axiomes, employés dans le même ordre, avec le même effet. Concluez que la même théorie s’applique aux idées d’objets infinis aussi bien qu’aux axiomes, et que partout l’expérience et l’abstraction suffisent pour expliquer les jugements et les notions que M. Cousin explique par la raison.

Essayons l’opération. Soit un corps connu par le toucher ou une sensation étendue observée par la conscience. Je puis séparer cette étendue de son sujet, et par abstraction la considérer à part. Cette étendue étant abstraite n’est rien que de l’étendue ; et ses parties, comme elle, étant étendues et n’étant rien de plus, sont absolument semblables l’une à l’autre. Ce qu’on exprime dans le langage ordinaire, en disant qu’entre les parties de l’espace pur il n’y a aucune différence. Donc ce qui sera vrai de l’une sera vrai de l’autre. Ainsi considérez l’une d’elles, vous connaîtrez toutes les autres. Or, arrivé à sa limite, vous apercevez une autre partie qui la continue. Mais la limite de cette autre partie est, d’après ce qu’on vient de dire, absolument semblable à celle de la première ; vous devez donc concevoir une troisième partie, c’est-à-dire un espace nouveau qui continue la seconde et la prolonge au delà de l’espace que vous avez considéré d’abord. De l’idée de ces trois étendues limitées, vous