Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/212

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de passion impatiente ; cette phrase retournée est un redoublement de logique victorieuse. Toutes les souffrances et toutes les hardiesses du Pascal que nous connaissions sont faibles auprès des ardeurs et des témérités du Pascal que M. Cousin révèle. Il a l’amour des grands hommes du dix-septième siècle : après avoir recueilli les moindres fragments de son auteur et retrouvé son écrit sur les Passions de l’amour, il a poussé la dévotion jusqu’à faire un lexique de ses locutions remarquables. Les érudits de la Renaissance qui ont édité les classiques ne faisaient pas si bien et n’ont pas fait mieux.

Si pourtant l’on veut voir ce talent de M. Cousin dans toute sa force, ce n’est point ici, c’est dans ses études sur Abailard, sur Xénophane et sur d’autres sujets semblables, qu’il faut l’admirer. L’esprit érudit réussit mieux qu’ailleurs dans les questions d’érudition pure ; on est toujours à son aise quand on est chez soi. M. Cousin découvre trois manuscrits d’Abailard ; il les décrit tour à tour avec scrupule ; il juge de leur valeur ; il prouve que ce sont eux que décrivait Oudin et que citait l’Histoire littéraire ; il entre dans l’intérieur du manuscrit, marque les différents traités qu’il comprend, les lacunes plus ou moins longues, les feuillets blancs, les feuillets noirs, les différentes encres, et je ne sais combien d’autres choses encore.