Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/323

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les bancs de la gauche. Ailleurs il déduisait de ses théories morales le gouvernement constitutionnel et la charte : tactique excellente, qui faisait du système un parti, reportait sur lui la faveur et l’intérêt mérités par les opinions libérales, et devait au jour du triomphe le changer en philosophie de l’État.

Déjà aidé par la popularité du libéralisme, M. Cousin s’aidait aussi de la popularité de l’histoire. Chacun sait que cette science est le plus grand effort et la plus grande œuvre du siècle. Elle est notre contemporaine ; au temps de Voltaire, on l’entrevoyait à peine ; au temps de Bossuet, elle n’était pas. Je ne parle point des innombrables recherches et des publications infinies qu’elle a produites, mais dû nouvel esprit qui l’a transformée. La critique, inconnue à Montesquieu, a paru, et l’exégèse allemande a fouillé les labyrinthes de l’antiquité connue et de deux ou trois antiquités inconnues. La sympathie, ignorée de Hume, a révélé les changements de l’âme, et Michelet, Thierry, Sainte-Beuve et tant d’autres ont écrit la psychologie des races, des individus, des siècles et des nations. L’analyse systématique et universelle, inconnue à Voltaire, a changé la foule éparse des événements en un corps de lois fixes, et M. Guizot a décomposé le mécanisme de la civilisation. M. Cousin profita de ce vaste mouvement en y