Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/324

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prenant part. Il réunit à sa philosophie l’histoire de la philosophie. Il en exposa un grand nombre de maîtres, il en édita plusieurs, il attira l’attention sur tous. Ces philosophies et leurs révolutions formèrent désormais une nouvelle série d’événements qu’il fallut ajouter aux autres. De cette révolution, M. Cousin eut justement la gloire, et injustement le profit. L’histoire des philosophies parut prêter de la certitude à sa philosophie ; il autorisa son recueil de théories vagues, en lui joignant un recueil de faits précis ; et le philosophe usurpa l’estime que méritait l’historien.

Secouru par la faveur et par les services de l’histoire et du libéralisme, il s’aidait encore lui-même. Nulle manœuvre ne fut plus heureuse et plus habile que la variation perpétuelle de sa doctrine et l’allure ondoyante de son esprit. Toujours quelque grand philosophe surgissait à point pour réveiller la curiosité lassée, ou pour appuyer le système chancelant. Les Écossais et M. Royer-Collard avaient plu, par transition, au sortir des analyses prudentes de M. Laromiguière ; bientôt ils parurent secs et bornés, et l’on s’engagea avec une curiosité inquiète dans la mine ténébreuse d’où Kant ébranlait toute la terre habitable. — Kant sembla profond, mais rebutant et scolastique. Les grâces ravissantes, le style divin, la nonchalance, la vivacité, l’enthousiasme de Platon couvrirent