Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/363

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de faits, aux rapports ou aux combinaisons de faits qu’ils signifient. Pour cela on met le mot dans les cas particuliers, singuliers et déterminés où il peut naître ; on le fait ainsi renaître ; et en répétant l’opération plusieurs fois, sur des exemples distincts et semblables, on finit par démêler la circonstance à laquelle il correspond. C’est le premier pas. Dans la traduction complète qui est le second, on ajoute à la connaissance de chaque fait noté la connaissance des inconnues qui l’entourent. Pour cela, on modifie l’objet observé ou l’on remplace l’instrument observateur. — Ces deux opérations accomplies, je ne vois plus rien à faire. Vous avez d’abord ramené la science à son objet ; maintenant vous agrandissez son domaine. Vous avez d’abord traduit chaque mot par un fait suivi d’un groupe d’inconnues ; maintenant vous traduisez chaque mot par un groupe de faits connus. Vous avez d’abord supprimé les êtres métaphysiques ; maintenant vous multipliez les êtres réels. Vous étiez dans une grande bibliothèque, sachant le nom de Virgile. Au premier moment, ce nom ne désignait pour vous aucun livre. Au second moment, vous l’avez aperçu sur la couverture d’un volume, et vous avez représenté parce nom le volume. À présent, vous avez ouvert le livre, et vous représentez par ce nom les cinquante pages que vous avez lues. Vos successeurs liront vingt pages de plus et