Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/58

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l’esprit humain. Je m’applique à réformer les désordres, à prévenir les dangers, à diminuer le mal, à augmenter la vertu. Je choisis les croyances d’après leur utilité ; je suis homme de gouvernement ; je forme des théories pour les mœurs. J’appelle intempérance et témérité tout ce qui ébranle les doctrines spiritualistes ; j’arrête d’avance les séditions de la rue en comprimant l’insurrection des esprits. Mais je serai conséquent, j’irai jusqu’au bout de ma tâche ; ce que je fais en philosophie, je le ferai dans toutes les sciences. Si vos maximes sont bonnes quelque part, elles sont bonnes partout. Si elles sont vraies en psychologie, elles sont vraies en géologie, en astronomie, en histoire naturelle. Si la philosophie ne doit pas être philosophique, mais morale, la science ne doit pas être scientifique, mais morale. Courons chez les savants, et que votre autorité les arrête sur le bord des funestes doctrines qui, insensiblement, goutte à goutte, vont faire couler la corruption dans le cœur humain.

Nous allons au plus vite chez M. Flourens, et nous le supplions de ne plus taillader de cerveaux vivants. « Fermez vos bistouris, vos scalpels, rengainez vos scies, lâchez vos poules, vos lapins, vos chats, vos cochons d’Inde. Quoi ! vous prouvez que la destruction des hémisphères cérébraux détruit la mémoire, les instincts, le raisonnement,