Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/61

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vance vous les voyez sourire, et reprendre l’un son scalpel, l’autre son marteau, l’autre son bocal. Faisons comme eux et reprenons l’analyse. Désormais, à leur exemple, nous ne craignons plus d’être appelés téméraires et sceptiques. Notre but n’est plus de prouver que la perception extérieure est certaine. Nous osons regarder de près les idées représentatives, meurtrières maudites de la certitude ; et si, par hasard, la vérité se rencontre chez elles, nous irons prendre chez elles la vérité.

Elle s’y rencontre. Nos idées sont si bien représentatives, que ce nom exprime leur nature et donne leur définition.

Que le lecteur daigne examiner une idée, celle de triangle, en elle-même, toute seule, sans considérer avec les yeux aucun triangle effectif et réel. Il découvrira dans cette idée toutes les manières d’être du triangle, ses trois côtés, ses trois angles, l’opposition du plus grand côté au plus grand angle, la propriété qu’ont les trois angles, de valoir ensemble deux angles droits, etc. Il apercevra ces manières d’être aussi pleinement et aussi aisément dans l’idée intérieure du triangle que dans le triangle extérieur lui-même. L’idée pourra donc tenir lieu du triangle. Elle le rendra présent quoique absent. Elle le représentera Elle est donc représentative. Il y a donc des idées re-