Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/354

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de faire arrêter M. le maréchal d’Ornano, et qu’un jour Monsieur l’en remercieroit. Monsieur lui dit : « Vous être un j… f..... », et s’en alla après ces belles paroles.

Le cardinal haïssoit Monsieur ; et craignant, vu le peu de santé que le Roi avoit, qu’il ne parvînt à la couronne, il fit dessein de gagner la Reine, et de lui aider à faire un dauphin. Pour parvenir à son but, il la mit, sans qu’elle sût d’où cela venoit, fort mal avec le Roi et la Reine-mère, jusque-là qu’elle étoit très-maltraitée de l’un et de l’autre. Après il lui fit dire par madame Du Fargis, dame d’atour, que si elle vouloit, il la tireroit bientôt de la misère dans laquelle elle vivoit. La Reine, qui ne croyoit point que ce fût lui qui la fît maltraiter, pensa d’abord que c’étoit par compassion qu’il lui offroit son assistance, souffrit qu’il lui écrivît, et lui fit même réponse, car elle ne s’imaginoit pas que ce commerce produisît autre chose qu’une simple galanterie.

Le cardinal, qui voyoit quelque acheminement à son affaire, lui fit proposer par la même madame Du Fargis[1] de consentir qu’il tînt auprès d’elle la place

  1. Le cardinal donnoit des rendez-vous à madame Du Fargis chez le cardinal de Bérulle à Fontainebleau et ailleurs, de peur de faire trop d’éclat, si c’étoit chez lui-même, et aussi à cause que ce cardinal passoit pour un béat. Bérulle croyoit que c’étoit pour quelque autre chose ; il parla aussi d’amour à madame Du Fargis, et lui mit le marché au poing.

    Ce fut la cabale des Marillac qui fit Bérulle, leur ami, cardinal et ministre. Le feu Roi disoit que c’étoit le plus vilain homme botté de tout le royaume. Malleville disoit qu’en trois semaines, qu’il fut au cardinal de Bérulle à l’Oratoire, il apprit plus de fourberies qu’en tout le reste de sa vie. Il avoit bien de l’hypocrisie ; on l’a vu passer dans le