Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/90

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qui fut un de ses témoins, et lui dit en dînant chez le premier président au sortir de là : « Monsieur, je vous ai rendu aujourd’hui le plus grand service que je vous pouvois rendre, en disant mon âge. »

On conte de lui une chose qui est assez de galant homme. La nuit, des filoux lui demandèrent la bourse. « Je n’ai rien, leur dit-il, je viens de perdre. — Monsieur, lui dirent-ils, nous vous connoissons, promettez-nous de nous donner quelque chose, et demain un de nous ira vous le demander. » Il leur promit trente pistoles. Le lendemain matin, un de ces honnêtes gens demanda à lui parler, et lui dit tout bas qu’il venoit quérir ce qu’il leur avoit promis. Il avoit oublié ce que c’étoit. L’autre l’en fit ressouvenir, il se mit à rire et lui dit : « Je tiendrai parole, mais il faut avouer que tu es bien imprudent. » En effet, il lui donna les trente pistoles[1].

  1. Turenne, comme chacun sait, se trouva dans une circonstance toute pareille, et tint la même conduite.