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LA COMTESSE DE MORET. M. DE CESY.


Madame de Moret étoit de la maison de Bueil[1] ; n’ayant ni père ni mère, elle fut nourrie chez madame la princesse de Condé, Charlotte de La Trémouille. Elle étoit là en bonne école. Henri IV, qui ne cherchoit que de belles filles, et qui, quoique vieux, étoit plus fou sur ce chapitre-là qu’il n’avoit été dans sa jeunesse, la fit marchander, et on conclut à trente mille écus. Mais madame la princesse de Condé souhaita que, par bienséance, on la mariât en figure, si j’ose ainsi dire. Césy, de la maison de Harlay, homme bien fait, et qui parloit agréablement, mais qui avoit mangé tout son bien, s’offre à l’épouser. On les maria un matin. Le Roi, impatient et ne goûtant pas trop qu’un autre eût un pucelage qu’il payoit, ne voulut pas permettre que Césy couchât avec sa femme, et la vit dès ce soir-là[2]. Césy, lâche comme un courtisan

  1. Jacqueline de Bueil, comtesse de Bourbon-Moret.
  2. Ce fait, indiqué dans les Amours du grand Alcandre, est rapporté à la date du 5 octobre 1604 dans le Journal de l’Estoile, tom. 47, pag. 476 de la première série des Mémoires relatifs à l’histoire de France. Barclay, dans l’ingénieuse satire de l’Euphormion, rapporte de la manière la plus spirituelle les conditions du mariage de Jacqueline qu’il désigne sous le nom de Casina. Nous en rapporterons ce passage : Nescio quis antistes in candidâ veste connubii legem ad hunc modum recitavit, novam sanè, et quam ideo in tabulâ descripserat, ne inter pronunciandum laberetur : Ut tu Oympio hanc Casinam conjugem tuam nec atti-