Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/473

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reparties, un peu trop ; il annonce la vue prochaine de la mer, il dit les noms des lieux, les faits concernant la route, et s’aide pour tout cela d’expressions énergiques, un peu trop. Néanmoins si l’on gêne sa manœuvre, si l’on se plaint de quelque chose, il redevient menaçant, Bédouin, un peu trop aussi. Mais d’autre part il s’en repent, et à la foudre succèdent subitement la sérénité du plus riant sourire et l’allégresse des plus éclatants jurons, un peu trop encore. Cependant son premier cheval ne cesse de retourner à Turin pendant que les deux autres nous mènent à Gênes.

L’autre cocher, cocher suisse, cocher de Genève, cocher de maître Lacombe, va son train toujours égal, garde son caractère posé, et la bonne-main n’y saurait rien changer. Très-grande distance morale entre ces deux hommes. Ce dernier a bien autre chose à penser, vraiment, que bonnes-mains et aubaines ! Il ne songe qu’à ménager les deniers qui seront le bénéfice de son maître, et ces droits de poste sur lesquels il n’avait pas compté lui ôtent tout repos, tout plaisir. « Si cela va de ce train, que lui rapporterai-je, à mon maître ? » Nous l’avons vu, de nos yeux vu, épargner sur son propre bien-être pour rapporter davantage, car épargner sur celui de ses chevaux, il aimerait bien mieux encore ne manger ni boire.