Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/490

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à accompagner moi-même mon dîner. » Et il retourne à ses fourneaux. Encore une fois, M. Paris est artiste, grand artiste ; car est-ce un esprit de métier, de profession, qui se manifesterait par de si nobles sollicitudes ? Non certes, la cuisine ainsi comprise est un art, un des beaux arts, un des très-beaux.

Pendant que ces choses se passent, quelques-uns dorment encore. M. Töpffer, avec tout ce qui est debout, part pour une navigation matinale. Il s’agit, cette fois, de sortir du port pour aller jouir à une distance convenable de la vue de Gênes la superbe, en sorte que l’amiral dirige droit sur l’Afrique. Mais à peine les esquifs ont-ils franchi l’ouverture qui sépare les deux môles, qu’ils trouvent là une sorte de vague fort brutale et des balancements bien propres à leur ôter jusqu’à l’envie de goûter aux gelées de M. Paris. On laisse alors l’Afrique là où elle est, et, en toute hâte, la flotte regagne le rivage. Mais les dormeurs viennent d’y arriver, qui réclament aussi leur navigation matinale. M. R*** consent à prendre en leur faveur les fonctions d’amiral, mais à la condition, dit-il, que sa manœuvre, quelque poltronne qu’elle puisse paraître, ne recevra que des éloges. « Je ne vous montrerai l’Afrique que de très-loin, ajoute-t-il ; et parce que mon nom ressemble beaucoup trop à celui de Ruyter, je prie que l’on n’en abuse point pour m’engager dans d’audacieux errements. »

Pendant cette navigation, M. Töpffer s’occupe de louer des fiacres, et le voilà aux prises avec vingt drôles qui lui font des prix fabuleux. Ce que