Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/140

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— Remets-toi, remets-toi, mon ami, me dit mon oncle Tom avec bonté. La chute t’a probablement affecté les fibres cérébrales, ce qui est cause de l’incohérence de ton discours. Il me fit asseoir, et, pendant ce temps, s’empressa de relever les deux in-folio, dont il avait considéré les ais fracassés avec plus d’émotion sans doute qu’il n’en avait ressenti en parlant à la belle juive. Il les replaça avec soin sur la table ; puis, revenant à moi : — Et tu voulais suspendre quoi ? me dit-il en me prenant la main de manière à glisser furtivement son index sur mon pouls.

Cette question m’était très-embarrassante, car en vérité il n’y avait pas apparence de chose à suspendre dans toute ma chambre. Aussi, connaissant d’ailleurs l’indulgente douceur de mon bon oncle Tom, j’allais lui raconter tout, lorsqu’au moment de le faire je ne le fis point.

C’est que, pour ce que j’avais dans le cœur, l’indulgence n’était déjà plus assez. J’aurais voulu de la sympathie, et mon oncle n’en pouvait éprouver que pour des idées abstraites, scientifiques. C’est ce qui fit que je répugnai à lui ouvrir mon cœur, crainte de faner un sentiment que j’étais jaloux de nourrir à ma guise.

— C’était pour suspendre… Ah ! mon Dieu, déjà !

— Hé ?

— Ah ! mon oncle, c’est fini.

— Quoi ?




En ce moment la lumière venait de s’éteindre dans la chambre du mourant, et avec elle tout mon espoir.

Pour mon oncle, à cette exclamation, il commença à juger le cas très-grave, et m’engagea à me mettre au