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— Eh bien, syndic de la commune, je vous somme de me délier ou de me faire délier par ce subalterne qui se bourre de tabac à vos côtés !

— On vous déliera assez ! dirent-ils tous les deux en même temps… Dites voir un peu votre affaire, ajouta le syndic.

Instruit par l’expérience, je m’étais promis de ne plus souffler mot des contrebandiers. — Mon histoire ? elle est fort simple. J’ai été attaqué et dépouillé par des brigands qui m’ont attaché à cet arbre, et je demande d’être délivré promptement.

— Ah ! voilà l’affaire ! dit le syndic. Des brigands, que vous dites ?…

— Oui, des brigands. Je passais la montagne avec un mulet qui portait ma valise. Ils m’ont volé et le mulet et la valise…

— Ah ! voilà l’affaire !

— Bien certainement que voilà l’affaire ! Et maintenant que vous êtes au fait, avancez et déliez-moi promptement. Allons !

— Voilà l’affaire ! répéta-t-il au lieu d’avancer. Dites voir ! C’est que ça va coûter beaucoup en écriture…

— Déliez-moi toujours, misérable ! Que voulez-vous donc que je fasse de vos écritures ?

— C’est que, voyez-vous, il faudra verbaliser, comme de juste.

— Vous verbaliserez après. Déliez-moi toujours.

— Pas possible, mon bon monsieur. Je serais en faute. Verbaliser d’abord, et puis vous délier après. Je vas faire quérir des témoins. Il faut que j’en aie deux à même de signer leur nom. C’est du temps qu’il faut pour les avoir, vous concevez ! et puis leur journée à payer ; mais monsieur a les moyens… Puis se tournant