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AROMES DU TERROIR


Véronèse aurait peint dans ses fonds lumineux
Le vert ensoleillé qui dominait la plaine ;
Diaz eût reconnu la claire marjolaine
Dans la montée abrupte aux talus floconneux.

C’est là que se vidait aux heures libertaires
L’école du village, oublieuse des lois,
L’écho s’embellissait de francs rires gaulois
Au scandale émouvant des voix autoritaires.

Les eaux, profondément, recelaient la vigueur
Des corps souples et sains nageant en contrebande,
Et puisant en baignade une grasse prébende
De gaîté, pour tromper d’imminentes rigueurs.

Des lutins habitaient les cavernes lacustres,
Attentifs à punir les grèves d’écoliers,
Et nouaient et tordaient en humides colliers
Les maigres oripeaux des bruyants petits rustres.

Ah ! le bon lac ! Il aimait trop les doux enfants
Pour tuer leur sourire, et jamais ses naïades
N’avaient, sous le filet des lâches embuscades,
Fermé de petits yeux dans les joncs étouffants.