Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/37

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uel arbre. Il y a vn autre fruict bien rare qu’on nome Ananazares, de la forme d’vn cocombre, de figure longue & rõde, grand d’vn pied, iaune en couleur, couuert de petites peaux ou bourles, qui s’eſleuent vn peu en forme d’eſcailles, vertes à l’extremite, & d’vne odeur tres-ſoüefue. On le mãge tout, apres qu’on l’a pelé, ayant le gouſt fort ſemblable a vn coin, encore eſt-il pl’agreable. On dit qu’il y a vne infinité d’autres fruicts, que ie n’ay point encore veus, cedant toutesfois en bonté à ceux que ie viens de dire. On ne trouue point icy de vos poires, põmes, prunes, ceriſes, peſches, mais bien force oranges & citrons. Reuenant donc à noſtre voyage, cependant que nous attendons le temps fauorable, deux des noſtres tomberent malades, le Pere Sebaſtien Minolfi Sicilien, lequel bien qu’il fuſt legerement malade, ne peut recouurer la premiere ſanté, que nous ne feuſſions au port de Goa : l’autre fut Blaiſe Faualle Veronois, qui fut emporte d’vne fieure maligne & dangereuſe. Dieu nous voulut ainſi dixmer. C’eſtoit vn ieune hõme de grande expectation, & d’vn grãd courage, Deux iours auparauant que tomber malade, il auoit paſſé toute la nuict entiere auec moy au cheuet d’vn pauure Soldat, qui eſtoit tombé