Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il eſtoit pres de la mer, il ſçeut tout auſſi toſt que noſtre nauire eſtoit au port. Le bon Pere (il s’appelle P. Gaſpar Fernandez) ſur le chãp enuoye ſon cõpagnon au nauire, pour ſçauoir ſi nous y eſtions point. Le Pere vint à noſtre bord enuirõ la minuit, & ainſi que nous eſtiõs encore auec luy deuiſans, cõme vous ſçauez, familierement & doucement par enſemble, voila qu’à trois heures de matin, le batteau qui nous deuoit porter à terre, arriua, & ſans que nous penſaſſions à rien, ils nous ſaluerent (comme ils ont accouſtumé de faire tous les Europeans, qui viennent pour eſtendre le Royaume de Dieu, & preſcher l’Euangile) auec vne belle aubade, car ils menoient des meneſtriers, leſquels allans tout autour du nauire, ſonnoiẽt melodieuſemẽt des hauts-bois.

Apres cela vn jeune enfant cõmença à entõner d’vne voix tres-belle & tres-agreable, Benedictus qui venit in nomine Domini, le coeur luy reſpondiſt tout auſſi toſt en Muſique, & chanterent comme cela vn aſſés long temps. Cela faict, nos Peres & freres, qui eſtoient venus dans le batteau (bien vne trentaine) montent à bord, & Dieu ſçait cõme ils nous accollerent eſtroictement & charitablement.