Page:Variétés Tome I.djvu/165

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa sœur, et (s’il faut ainsi parler) le père à sa propre fille, disans que l’inceste n’est pas defendu de Dieu, mais de l’Église seulement, et mesme que c’est mesme chose d’abuser d’une seculière ou d’une sacrée fille de religion, d’une qui ne nous est parente ou d’une de nostre sang, en quelque degré que ce soit.

Et je donne à penser, suyvant ceste malheureuse et meschante coustume, combien de mariages illicites se traitent journellement entre gens de semblable farine. Que si quelque jeune femme mariée, aiant un mary de bonne foy, est une fois ensorcelée et tant soit peu encharmée des enchantemens de leur doctrine, si faire se peut ils la seduisent, luy preschant si dextrement à leur mode la voye de salut, qu’ils la retirent de la compagnie de son vray mary, de sa puissance et de son authorité, et la mainent à l’infame bordeau de Genève, où, par une devote charité, ils paillardent ensemblement, couvrant toutesfois leur mal-heureux adultère d’un faux et simulé mariage. Je laisse une si longue diggression, appartenant plustost à l’orateur qu’à l’historiographe, pour revenir à mon propos et à la vehemence du feu eslancé par le vouloir de Dieu sur le village de Coulonge, et, bien que ce ne soit une chose non encore veue que de voir embraser les villes et villages, si est-ce que toutesfois je veux bien advenir cette pernicieuse ville de Genève qu’elle prenne garde à elle, à laquelle il pourroit bien arriver semblable inconvenient, comme il arriva à Sodome et Gomorre ; et faut estimer que le feu de Coulonge n’est qu’un commencement et rien plus qu’une menace