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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/103

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végétale. Une partie des consommateurs, nombreux vu heure de l’apéritif et la journée maussade, suivaient les opérations d’un œil réprobateur et intrigué ; d’autres affectaient d’ignorer ces intempestifs travaux de nettoyage. Un vieux monsieur décoré, de tournure militaire, querellait un garçon en lui montrant au-dessus de sa tête les lampes veloutées de moisissure minium, d’où la poudre impalpable neigeait dans son « mandarin »… Mais là ne se bornait pas la perturbation. La plupart des gens, dans le café, clients et personnel, se grattaient, avec une discrétion variable suivant leur tempérament et leur genre d’éducation ; ils se grattaient, en décochant à leurs voisins des regards méfiants, inquiets ou menaçants.

— C’est dégoûtant ! protesta, furibond, un gros citoyen barbu. Gérant ! faites donc chercher de la poudre insecticide !

Une révolution grondait, que les gérants, effarés mais toujours dignes, tentaient d’apaiser, en aidant les garçons à essuyer les tables, changer les ampoules et, en désespoir de cause, protéger les consommations à l’aide de soucoupes renversées sur les verres.

Aurore vint à moi, en jetant un œil consterné sur cette agitation, et se laissa aller sur la banquette.

— Ici aussi ! fit-elle. Savez-vous, mon cher Gaston, que c’est pareil aux Galeries Lafayette, d’où je sors Le magasin est plein d’échelles, d’électriciens et de pompiers ; malgré cela on n’y voit presque plus et il tombe