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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/255

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« De qui parlait-il ? D’une bande de harpies communistes ?… Non, « des boules de feu vertes » ! Impossible de tirer de lui rien de cohérent. Le petit bonhomme était fou, fou de terreur. Et, pour me renseigner dehors, pas un chat dans les rues éclairées de nouveau par les réverbères électriques, Seulement, vers le quai de Saint-Ouen, les « tromblons » fumaient toujours… Allons, pour des gens « bouffés », le personnel ne travaillait pas trop mal. Je renonçai à comprendre, et, mes phares allumés, roulai vers Paris, à petite vitesse, pour éviter la panne ; car mon moteur « faisait » de nouveau du lichen.

« Tu sais que l’usine Hénault-Feltrie est située à l’entrée de Saint-Denis, 500 mètres à l’est de la route nationale. En virant sur celle-ci vers le sud, j’entendis qu’on me hélait du nord. Je distinguai en travers de la chaussée, sous un réverbère, un barrage de charrettes et de tonneaux, et derrière, des types avec des fusils. Communistes ou gendarmes, je crus qu’ils en voulaient à ma bagnole, et j’accélérai, filant sur Paris.

« Il venait évidemment de se passer quelque chose de considérable… un drame. Cette route, d’ordinaire si passante, était absolument déserte… déserte de vivants, car presque tout de suite il me fallut éviter un corps étalé à terre : un cadavre affreusement brûlé… puis un autre, et d’autres encore : des agents cyclistes, auprès de leurs machines puis un cabriolet à demi consumé, qui fumait encore, par dessus le cheval abattu.