Aller au contenu

Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Eyguzon, 27 octobre.
« Cher Gaston,

« Mon père m’envoie à Paris pour deux jours. J’arriverai le 29, à 18 heures. Rendez-vous en gare d’Austerlitz. Si je ne vous vois pas sur le quai ou à la sortie, j’irai directement chez vous.

« Votre « AURORE ».

Ce n’est rien, ces trois lignes, et la formule finale n’est peut-être rien d’autre qu’une formule, dans son esprit à elle, mais moi j’y vois un témoignage d’amour qui s’avoue à demi.

Espoir !… reconnaissance !… vertige éperdu de tendresse !… Quelle bonne petite fille ! Quelle bonne petite fille ! » répétais-je sans fin… Cette tension d’impatience qui s’affole en moi, comment la soutenir durant toutes les heures… combien d’heures ? Trente-trois ! C’est terrible !… qui me séparent encore de son arrivée…

Mais me voici désormais immunisé contre la contagion de la folie unanime, que j’avais laissée m’envahir ; voici ma personnalité retendue, gonflée à bloc…

Et c’est avec un sourire que j’accueille, arrêté au passage devant la loge, les doléances de Mme Taquet. Elle me débite ce qu’elle voulait me dire tout à l’heure, là-haut : il est question d’évacuer Paris et de le nettoyer par les gaz. Qu’est-ce que j’en pense ? Elle sollicite mon avis, comme elle aime de le faire dans les circonstances difficiles ou embarrassantes.

— Euh ! madame Taquet, oui, en effet, on parle de