Aller au contenu

Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/287

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Anxieux d’impatience, je repassais les phrases que je dirais pour lui annoncer le mariage de Cheyne ; je savourais d’avance sa surprise joyeuse, le renouvellement de son aveu d’amour…

À 18 heures moins 5, en sentant quelqu’un me taper sur l’épaule, je fis un bond d’énervement et poussai même un cri. Je me retournai :

— Monsieur Nathan !

Dans mon optimisme, dans ma joie bienveillante à tout et à tous, je saluai spontanément le grand biologiste, à qui je pardonnais de bon cœur toutes ses impolitesses passées, présentes et à venir, trop heureux qu’il m’eût fait l’honneur de me reconnaître. Pourtant, la familiarité impérieuse de cette tape sur l’épaule m’étonnait ; elle ne cadrait pas avec le souvenir que je gardais de son attitude olympienne. Il fallait que le vieux savant fût fort troublé, hors de son état normal.

Immobile dans sa pelisse à col de fourrure, il me considérait pensivement, ses gros sourcils blancs froncés… Comment dire ? Un souci à haute tension irradiait de ses traits contractés.

À la fin, d’un geste pesant et quasi absent, il me tendit la main.

— Monsieur Delvart, vous attendez aussi, je suppose, Mlle Lescure ? Je suis heureux de vous trouver là et que vous soyez de ses amis. Laissez-moi dire, je n’ai pas le temps… il est moins quatre, son train va arriver. Il