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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/47

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— Cela m’étonnerait d’elle, fis-je simplement… Allons, à tantôt.

Et là-dessus je regagnai mon hôtel.

Dans la salle à manger, les pensionnaires étaient déjà à table. J’eus la satisfaction de ne pas voir les de Ricourt, partis tous trois en auto pour la journée. Mais je dus serrer quelques mains au passage, avant d’arriver à ma place, et je perçus derrière mon dos une réflexion insuffisamment discrète sur l’« aviatrice accidentée ».

Tout en déjeunant, je songeais que M. Botin et les camionneurs avaient jasé, Mme Alburtin aussi sans doute ; la curiosité publique était en éveil. Un ou deux journalistes parisiens, à ma connaissance, villégiaturaient à Cassis. N’aurais-je pas dès cette après-midi à défendre « Mlle Aurette Constantin » contre une tentative d’interview ?

Mais pourquoi cette répugnance d’Aurore à l’égard des reporters ? Simplement par amour-propre, par crainte d’avouer qu’elle n’avait pas atteint la Lune ?… Cela ne suffisait pas à expliquer l’espèce d’irritation, de révolte, qu’elle trahissait à chaque fois qu’il était question du directeur de la Moon Gold, Lendor Cheyne, et même de son père. J’imaginais vingt hypothèses pour me rendre compte de ce mystère… ou évidemment elle ne pouvait manquer de jouer le beau rôle de damoiselle persécutée. Et je rêvais, donquichottesque, de devenir son chevalier, de combattre pour elle, de l’arracher à je ne sais quelle trame suspecte où elle se