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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/52

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elle redevint Aurore Lescure, la première femme astronaute, aux prises avec un compagnon agréable mais qu’il convient de tenir à distance, Mais bientôt, d’abord volontairement pour me montrer qu’elle ne me tenait pas rigueur de ma déclaration prématurée, puis se laissant aller insensiblement, elle redevint confiante et me livra de nouveau une âme d’enfant, sœur de mes rêves.

La rebuffade que je venais de recevoir, cependant restait en moi comme un noyau de gêne. J’étais comblé, attendri de ces confidences délectables ; mais quand même je ne pouvais m’empêcher de remarquer qu’elle ne m’avait rien dit de son père, ni de son fiancé, ni des raisons qui lui faisaient redouter les journalistes… Elle m’avait livré des confidences rétrospectives, traité en bon camarade, oui, mais pas en ami, en ami vrai. Alors que tout en elle me plaisait, m’enchantait, que je m’accrochais à elle de toutes mes antennes, je ne sentais pas la réciprocité attendue, espérée, nécessaire. Je me scandalisais de cette dénivellation entre nos sentiments. Et pourtant ! Comme elle le disait : elle ne m’avait pas vu au cinéma. Ma « cristallisation » amoureuse était trop en avance sur la sienne. Pour elle, je n’étais, je ne pouvais encore être qu’un bon camarade.

Nous arrivions sur le port, lorsque dans un groupe de badauds qui regardaient débarquer des sardines, je reconnus, trop tard, le hideux calot blanc de marin américain dont s’affublait Géo et le sweater jade de