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Page:Varlet - La Grande Panne, 1930.djvu/65

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À plusieurs reprises depuis Cassis, Alburtin avait lâché le volant d’une main pour se gratter vivement la nuque, ce qui provoquait des embardées. Après une plus forte, arrivé au col de la Gineste, il fit halte.

— Toutes mes excuses, mademoiselle ! C’est idiot, mais je suis dévoré de puces. Si je n’ai pas deux minutes de répit, je n’arriverai pas à conduire proprement dans la descente. (Et il se gratta sans vergogne, avec une rage joviale). Mademoiselle, je crains que vous n’en ayez eu aussi ? Ma femme s’en est plainte ; il doit y en avoir une invasion à la clinique…

— Dites plutôt dans Cassis, interrompis-je. J’en ai eu également à l’hôtel Cendrillon.

La passagère se dérida un instant.

— Vous me rassurez, docteur, Quand ces démangeaisons m’ont prise hier soir, je me suis crue atteinte d’une maladie de peau, et ce matin, sans mon départ précipité, je vous aurais demandé une consultation.

Égayée par l’épisode burlesque, le temps de l’arrêt elle consentit à regarder la rade de Marseille qui s’étalait au loin, vaporeuse dans la gloire de la lumière matinale et dans l’haleine géante de la ville et des ports. Mais lorsqu’on fut reparti, dévalant les pentes désertiques, l’arrivée derrière nous d’une auto plus rapide, qui s’amusait à nous dépasser, rendit notre compagne à sa préoccupation… Elle avait craint, évidemment, que ce ne fussent des journalistes lancés à notre poursuite.