Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, Partie II, 1894.djvu/175

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cris gutturaux de sentinelles enrouées. La nuit très obscure empêchait de rien voir.

Lorsque le jour reparut, on fut fixé. L’îlot servait de refuge à une tribu de quadrumanes, de ces grands chimpanzés, dont le Français du Chaillu a raconté les prouesses, alors qu’il leur donnait la chasse à l’intérieur des Guinées.

Et, ma foi, bien qu’ils eussent empêché son sommeil, Gildas Trégomain ne put qu’admirer ces magnifiques échantillons d’anthropoïdes. C’étaient précisément ces jockos de Buffon, qui sont capables d’exécuter certains travaux ordinairement réservés à l’intelligence et aux mains humaines, grands, forts, vigoureux, le prognathisme de la face peu accusé, les arcades sourcilières présentant une saillie presque normale. C’est en gonflant leur poitrine et en la frottant avec vigueur qu’ils produisent ce bruit de tambours.

Au vrai, comment cette bande de singes, — il y en avait bien une cinquantaine, — avait élu domicile dans cet îlot, comment elle s’y était transportée de la terre ferme, comment elle y trouvait une nourriture suffisante, à d’autres d’expliquer cet état de choses. Du reste, ainsi que Juhel ne tarda pas à le recon-