Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, Partie II, 1894.djvu/36

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nerveux, les yeux vifs, durs, émerillonnés d’un regard fuyant, la figure glabre sans un poil de barbe, le teint parcheminé, les cheveux grisonnants et feutrés comme une calotte qui eût été collée à son crâne, le dos légèrement arrondi, les mains ridées, munies de doigts longs et crochus. Il possédait toutes ses dents — des dents habituées à mordre que découvraient volontiers ses lèvres minces. Quoiqu’il ne fût pas observateur, maître Antifer sentit que la personne de ce Zambuco n’offrait rien de sympathique, et il se dit que d’entrer en rapport avec un tel bonhomme ne pourrait jamais lui procurer aucun agrément.

Au vrai, le banquier n’était qu’une sorte d’usurier, un prêteur sur gages, qui aurait pu naître juif et qui était d’origine maltaise. De ces Maltais, il y en a de cinq à six mille à Tunis.

Zambuco passait pour avoir amassé une grosse fortune dans toutes les louches opérations de banque — celles qui se font avec de la glu aux doigts. Riche, il l’était, en effet, et il en tirait vanité. Mais, à l’entendre, on n’est jamais riche tant qu’on peut le devenir davantage. On le disait plusieurs fois millionnaire,