Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/40

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aide, comme il le raconte dans le poème de Leconte de Lisle.

Par cette addition, notre poète risquait d’introduire dans la légende un singulier anachronisme. Car l’épisode d’Ambarîsha étant, dans le poème indien, raconté pendant l’enfance de Rama et comme une histoire déjà assez ancienne, il en faut conclure que ce roi vivait bien avant Rama : peut-être était-ce un de ses ancêtres. Leconte de Lisle, en plaçant l’enlèvement de Sita avant le sacrifice de Çunacépa, bouleversait la chronologie. Il y a remédié en changeant le nom du roi. Ce n’est plus, chez lui, Ambarîsha qui réclame une victime ; c’est un roi qu’il appelle « le fils de Daçaratha » ; c’est donc sans doute Rama lui-même, Rama devenu vieux. L’anachronisme a été ainsi évité et l’histoire de Çunacépa rattachée à celle de Rama. On dira peut-être que c’est là une audace un peu bien forte. En effet ; mais ce n’est pas Leconte de Lisle qui a donné l’exemple des audaces de ce genre : le Ramayana primitif a été enrichi d’un grand nombre d’interpolations, qui ont rattaché à l’histoire de Rama, quand elle fut devenue très populaire, des légendes qui jusque-là avaient pour héros de tout autres personnages.


Sur le conseil de l’oiseau, les deux enfants vont donc trouver Viçvamitra. Chez Leconte de Lisle, on ne voit pas, comme dans le récit qui lui a servi de modèle, l’ascète demander à ses fils de mourir pour le jeune homme et les maudire de lui avoir fait cette réponse assez raisonnable : « Sacrifier tes fils pour les fils d’autrui, c’est dévorer ta