Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/94

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et agitées par le vent favorable de deux éventails brillants comme deux cygnes[1].


Le chapitre d’où est tiré le premier de ces fragments, après avoir décrit le corps de Bhagavat, tel qu’il se manifeste aux élus par la puissance de la Maya, explique comment le sage peut se fondre dans l’Être suprême. L’opération est d’un matérialisme assez grossier : le solitaire se réfugiera dans un repos absolu ; fermant avec ses talons les voies inférieures, il rappellera en haut, sans se lasser, le souffle de vie des six demeures où ce souffle réside ; attirant le souffle vital du nombril dans son cœur, il le fera monter de là, par la voie de l’air nommé Udâna, dans sa poitrine ; ensuite, maître de son attention et réunissant le souffle de vie à son intelligence, il l’amènera peu à peu jusqu’à la racine de son palais ; de là, il le conduira dans l’intervalle de ses sourcils, fermant les sept voies qui lui sont ouvertes, et, étant resté en cet état une demi-heure, à l’abri de toute distraction, possédant toute l’intensité de sa vue, il ouvrira au souffle vital une voie à travers le crâne et abandonnera son corps pour aller se réunir à l’Être suprême[2].

Décrit plus brièvement et avec quelques belles comparaisons pour le sauver du grotesque, tel est l’exercice auquel se livrent les trois sages de Leconte de Lisle. L’effet en est souverain : dans le sein sans bornes de Bhagavat, ils s’unissent à l’essence première,


  1. Liv. III. ch. XV, v. 38.
  2. Liv. II, ch. II ; trad. Burnouf, t. I, p. 211. Je mets en italique les mots conservés par Leconte de Lisle.