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Page:Victor Brochard - Les Sceptiques grecs.djvu/130

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LIVRE II. — CHAPITRE II.

ces temps de luttes continuelles et publiques, la philosophie du doute était la plus facile à défendre. N’être embarrassé d’aucun dogme, ne donner prise sur soi à aucun adversaire, prendre toujours l’offensive, et n’avoir rien à garder, était une attitude commode et avantageuse, pour un orateur avide de popularité et attaché avant tout au succès. Aucune autre doctrine ne pouvait donner à l’éloquence plus d’occasions de briller ; aucune n’était plus, appropriée à la souplesse d’esprit et à l’habileté oratoire dont nous savons qu’Arcésilas a donné tant de preuves. Nous ne pouvons rien affirmer, et il faut nous aussi nous contenter ici de vraisemblances ; il est vraisemblable que des raisons de cet ordre ont été de quelque poids dans la balance où Arcésilas, avant de prendre parti pour l’indécision, a pesé le pour et le contre.


V. La nouvelle Académie ne brille dans l’histoire que d’un éclat intermittent : à la distance où nous sommes, nous ne la connaissons que par les grands noms qui l’ont illustrée ; les sommets seuls émergent de l’oubli. Pour avoir des renseignements précis, il faut aller d’Arcésilas à Carnéade, et franchir une période de cinquante ans.

Nous savons pourtant que dans l’intervalle, la doctrine n’a cessé ni d’être représentée ni d’être enseignée, et si incomplètes qu’elles soient, les données que nous possédons nous prouvent que l’activité philosophique, si elle a été moins heureuse, ne s’est pas entièrement arrêtée. Les chefs de l’école entre Arcésilas et Carnéade nous sont connus ; nous savons même les noms d’un grand nombre de philosophes, qui sans avoir eu la direction de l’école, demeurèrent attachés à la doctrine du maître.

Lacydes, Téléclès et Évandre, Hégésinus, tels furent les chefs de la nouvelle Académie ; Carnéade fut le quatrième[1].

Lacydes devait avoir quelque célébrité, puisque Diogène a

  1. Cic., Ac., II, vi, 16.