Page:Vidocq - Mémoires - Tome 2.djvu/154

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réparer les pertes du dernier combat, l’armateur ne manquerait pas d’envoyer quelques-uns de ces hommes dont le général jugerait à propos de se défaire. Puisque Canivet et ses affidés ne devaient plus reparaître dans les camps, je crus qu’il n’y avait plus aucun inconvénient à me faire soldat. Muni des papiers de Lebel, je m’enrôlai dans une compagnie de canonniers de marine, qui faisait le service de la côte ; et comme Lebel avait autrefois été caporal dans cette arme, j’obtins ce grade à la première vacance, c’est-à-dire quinze jours après mon admission. Une conduite régulière et la parfaite intelligence des manœuvres, que je connaissais comme un artilleur de la vieille roche, me valurent promptement la bienveillance de mes chefs. Une circonstance qui aurait dû me la faire perdre acheva de me concilier leur estime.

J’étais de garde au fort de l’Eure ; c’était pendant les grandes marées, il faisait un temps affreux ; des montagnes d’eau balayaient la plate-forme avec une telle violence, que les pièces de trente-six n’étaient plus immobiles dans leurs embrasures ; à chaque renouvellement de la lame, on eût dit que le fort entier allait être emporté. Tant que la Manche ne serait pas plus