Page:Vielé-Griffin - Le Domaine royal, 1923.djvu/92

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Cette chair vive où Tu t’incarnas, vagissant ! Voici que Sarah pleure, hésite et ne peut croire Que nous irions franchir le seuil d’or de la gloire, Nous que drape et qu’orna le péché des humains D’un voile purifié du toucher de Tes mains, — Alors que languirait, loin de l’Aurore immense, Toute cette aube pure où l’OEuvre recommence ?» Et le Christ en des mots que n’ouït nulle oreille, Mais de tous entendus en musique pareille, Sans doute, à l’harmonie ineffable des sphères, Tels qu’on ne les traduit qu’en tremblant de le faire, Dit ceci : « Sois sans peur, Mère frêle des hommes ; Ne t’aura-t-il suffi d’avoir mordu la pomme ? Ta curiosité demeure insatiable ; Tes fils, multipliés comme les grains du sable, Envahissent la terre et vont, du pas certain Des dunes que l’on voit filtrer entre les pins, Indiscontinûment, grain à grain, homme à homme, Au but, où la Sagesse éternelle les somme. Que sais-tu de ton Dieu, si ce n’est qu’il est Fils De ta chair : n’est-ce pas que cela te suffit ? Quels millions de jours comptent devant ma Face ?