Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/57

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cours préliminaire. Aujourd’hui, je reprends quelques-unes de mes assertions, je les détaille, et je les prouve ; je tombe dans des minuties, je suis technique, ennuyeux ; n’importe, excusez-moi par le motif.

Constatons d’abord un premier fait, c’est que la langue latine était par sa nature, par ses formes savantes et complexes, promptement exposée à subir de graves altérations. Une langue synthétique, comme l’appelle M. Schlegel, une langue qui ne procède point par des moyens simples, analogues aux besoins rigoureux des idées, mais qui, dans sa construction habilement systématique, offre des cas nombreux, des désinences variées, des verbes multiples dans leurs temps et dans leurs modes, des inversions prolongées, une syntaxe artistement combinée, une langue ainsi faite, à son plus beau période, est susceptible d’une grande perfection oratoire et poétique ; mais, sitôt que la barbarie et l’ignorance viennent la heurter, ce magnifique édifice doit rapidement se dégrader et se détruire. Pour changer ma comparaison, c’est un instrument musical, délicat, compliqué, qui ne pouvait être touché que par un artiste, et qui se dérange ou se brise sous des mains grossières et maladroites.