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tard que les autres langues issues du latin. Le latin résista plus longtemps en Italie qu’ailleurs. Portez vos souvenirs sur les faits historiques. Quand Charlemagne vint à Rome, le salut, les cérémonies, les acclamations populaires, tout cela fut latin. Vivat Carolus Augustus, imperator. Il semble que, si des mots en langue vulgaire eussent été prononcés par le peuple, la chronique les eut annotés, comme elle a fait pour le serment de 842.

Évidemment, c’était une sorte d’honneur que l’on accordait toujours aux prêtres de l’Église latine, de leur parler leur langue. Quand vous voyez plus tard le pape Étienne IV venir à Reims visiter Louis le Débonnaire, les historiens ont soin de dire que les saluts se firent en langue latine. Le latin était toujours la langue vivante de l’Église, et par cela seul il dominait tous les idiomes vulgaires ; par là aussi le latin dut être plus inviolable, plus lentement corruptible en Italie que partout ailleurs. À cet égard il faut que je vous cite le curieux aveu de Muratori. Il ne doute pas qu’il n’ait existé, au ixe siècle, une langue vulgaire. Il en trouve la preuve dans bien des mots épars, et dans cette épitaphe d’un pape :

Usus francisca, vulgari, et voce latina,

Edocuit populos eloquio triplici.