Page:Villemain - Cours de littérature française, tome 1.djvu/85

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vulgaire, qui est voisine du latin. » Mais cela prouve, ce que l’on sait, une corruption de la langue romaine, une langue vulgaire enfin, mais non qu’elle fût la même en Italie qu’en France. Il y a de graves motifs d’en douter, malgré l’imposante autorité de M. Raynouard. Ce qui paraît certain, c’est que, dans la décadence de la langue latine et le mélange des peuples, la régularité de la corruption fut plus hâtive en France qu’en Italie ; que le roman de la France méridionale était commun aux provinces limitrophes d’Espagne, et même, avec de légères différences, à plusieurs parties de la France septentrionale.

En effet, le monument le plus antique d’une langue moderne parlée dans la France du Nord, les serments prononcés en 842 par Louis le Germanique et les seigneurs français, se rapprochent beaucoup du roman provençal tel que nous le voyons au xe siècle. Malgré l’aridité de ces détails, n’éprouverez-vous pas, Messieurs, quelque intérêt à considérer le plus vieux et le plus grossier essai qui nous reste de cet idiome national illustré par tant de rares génies dans les deux derniers siècles ; de cet idiome organe de tant de pensées généreuses qui ont agi sur l’univers, vive expression de nos mœurs, et qui un