Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/226

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gner du temps, qu’elle était toujours celle qu’il avait connue.

Se savoir aimée de vrai, cela lui faisait du bien. Comment y renoncer ? Pourquoi le rendre si vite malheureux ? Ne saurait-il pas toujours assez tôt ? Elle devait s’efforcer de faire durer l’illusion de Guilhem jusqu’à la fin, s’il était possible. « Il a encore trois années ! » se disait-elle ; — et cela l’enhardissait. Et puis, elle ne pouvait s’en empêcher. C’était son seul et poignant bonheur. — « Tant mieux, s’il vient me tuer, quand il apprendra mon inconduite !… pensait-elle. Soyons heureux d’ici là ! » — Ce qui ne l’empêchait pas, lancée comme elle était, de continuer, dans les intervalles, son train de fille qui s’étourdit et se donne « du bon temps » avec les étudiants et les officiers.

Tout à coup, plus de lettres. C’était la cinquième année, aux premiers mois seulement.

Ce silence brusque la remplit d’une angoisse violente. Saurait-il ? A-t-il appris ?