Page:Vogüé - Histoire orientales, 1880.djvu/129

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sur les assassins mais il trouve toujours quelqu’un à livrer au consul, qu’il faut contenter tout d’abord. On s’avisa que j’avais été le domestique et sûrement le meurtrier de la victime ; les zaptiés me découvrirent dans le khân où je venais d’arriver, ils me chargèrent de fers et me conduisirent au konaq. Mes protestations ne servirent de rien, mieux eût valu avoir quelques piastres pour faire reconnaître mon innocence et trouver un autre coupable. Je n’avais pas un para : on me jeta en prison, et la justice fut satisfaite.

Puisque tu vas à Brousse, tu verras dans la cour du konaq, sous les fenêtres du gouverneur, un grand bâtiment carré fermé de grilles, et derrière ces grilles une centaine de têtes qui regardent d’un air ennuyé les passants ou causent avec eux à travers les barreaux. C’est la prison où je fus enfermé. Il y avait là nombreuse compagnie pêle-mêle : quelques criminels, de pauvres diables qui avaient dévalisé une boutique, des Grecs qui avaient battu un musulman, des juifs qui avaient battu un Grec, et des malheureux comme moi qui n’avaient pas de chance. Tout ce monde demeurait là depuis un temps variable, suivant le hasard des circonstances ; quand il n’y avait plus de place pour de nouveaux condamnés, on relâchait les plus anciens ou ceux dont la famille pouvait payer. N’étant dans aucun de ces deux cas, je savais qu’il me faudrait une longue p