Page:Vogüé - Histoire orientales, 1880.djvu/130

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atience. J’ai appris plus tard que, deux mois après mon arrestation, les Zéibeks assassins de mon maître avaient été pris par les nizams et pendus. Malheureusement le consul n’avait plus rien demandé et le pacha m’avait oublié : personne ne se souvint à cette occasion que j’avais été arrêté pour le même fait, et on ne pensa ni à me juger ni à me libérer. D’ailleurs le temps passait assez bien en prison ; il y avait là foule de gens de tous les états et de tous les pays qui racontaient des histoires instructives, et quelques Hellènes qui causaient fort agréablement. Un écrivain public, enfermé pour avoir contrefait des signatures, m’apprit à tracer des sentences en belles lettres persanes ou en vieux caractères arabes. Je m’essayais à les reproduire avec du charbon sur le mur blanchi à la chaux ; comme j’avais encore dans la mémoire les belles inscriptions vues au Caire et à Damas, je devins en peu de temps plus habile que mon maître.

Un jour, le pacha qui visitait la prison entra subitement dans la grand’salle, comme j’écrivais au-dessus de la fenêtre, pour la consolation des prisonniers, ce verset du Koran : « Et ceci aussi passera. » Le gouverneur admira la beauté de mes lettres et me félicita chaudement. Tu sais, effendi, que nul art n’est en si grande estime chez les Turcs.

Le lendemain il me fit appeler au konaq et me demanda de décorer en caractères koufiques, comme ceux de la Mosquée-Verte, le tour de son