Page:Vogüé - Histoire orientales, 1880.djvu/138

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En quittant la maison du juif, tout accablé de la chute de mes espérances, j’entrai machinalement dans un de ces cafés où le peuple de Bagdad se divertit le soir à écouter les conteurs en renom. Hadji-Mohammed-Hafiz, conteur célèbre dans tout le pays arabe, occupait à ce moment la banquette et disait aux auditeurs accroupis à ses pieds sur les nattes une histoire qui finissait ainsi :

« Un jour d’été, aux temps des glorieux khalifes ― car vous verrez, croyants, que tout ceci ne serait plus possible aujourd’hui ― le Bien et le Mal se rencontrèrent dans un jardin de Damas ; ne sachant que faire pour se distraire durant la chaleur du jour, ils résolurent de jouer le monde aux dés. Le Mal, ayant préparé les dés, gagna par fraude et se prétendit maître du monde. Une discussion s’ensuivit, les deux joueurs vinrent devant le cadi. Le Bien expliqua la tromperie de son adversaire ; mais le Mal avait acheté le cadi, qui le confirma dans la possession du monde. Le Bien appela du jugement