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ACTE III, SCÈNE II. 119

menaces paraîtrait déplacé. Le spectateur ne voit pas comment la princesse peut les mériter; elle vient, par déférence pour le roi, de refuser la visite d'un ambassadeur : il semble que cela ne doit pas engager à dévaster son pays. De plus, le faible Prusias qui parle tout d'un coup de montagnes de morts à une jeune prin- cesse, ne ressemble-t-il pas trop à ces personnages de comédie qui tremblent devant les forts, et qui sont hardis avec les faibles?

Vers 50. Je serai bien changée et d'âme et de courage; mauvaise façon de parler. Ame et courage, pléonasme.

Vers dern. Adieu.

Remarquez qu'un ambassadeur de Rome qui ne dit mot dans cette scène y fait un personnage trop subalterne. 11 faut rarement mettre sur la scène des personnages principaux sans les faire parler : c'est un défaut essentiel. Cette scène de petites bravades, de petites picoteries, de petites discussions, entre Prusias et Lao- dice, n'a rien de tragique; et Flaminius, qui ne dit mot, est in- supportable.

SCÈNE II.

Vers! Madame, enfin, une vertu parfaite...

Ce n'est guère que dans la passion qu'il est permis de ne pas achever sa phrase. La faute est très-petite, mais elle est si com- mune dans toutes nos tragédies qu'elle mérite attention.

Vers 2. Suivez le roi, seigneur, votre ambassade est faite.

Votre ambassade est faite est un peu comique. Sosie dit dans Amphitryon 1 :

juste ciel ! j'ai fait une belle ambassade !

Mais aussi c'est Sosie qui parle.

Vers 13. La grandeur de courage en une âme royale

N'est, sans cette vertu, qu'une vertu brutale, etc.

Cette expression est très-brutale, surtout d'un ambassadeur à une princesse. D'ailleurs, ce discours de Flaminius, pour être fin et adroit, n'en est pas moins entortillé et obscur. Une vertu brutale qu'un faux jour d'honneur jette en divorce avec le vrai bonheur,

1. Acte I er , scène n.

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