Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/158

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Mme Pâris de Montmartel qui l’avait engagé à cette bonne œuvre. Il fut chassé de la maison. C’est, au demeurant, un homme d’honneur, loué dans les journaux, et à qui Rousseau a, je crois, adressé une épître[1].

En voici d’un nommé Ravoisier, qui se disait garçon athée de Boindin : il m’appelle son protecteur, son père ; mais, en avancement d’hoirie, il finit par me voleir vingt-cinq louis dans mon tiroir.

Un Demoulin, qui me dissipa trente mille francs[2] de mon bien clair et net, m’en demanda très-humhlement pardon dans quatre ou cinq de ses lettres ; mais celui-là n’a point écrit contre moi : il n’était pas bel esprit.

Le bel esprit qui m’écrivit ce billet connu, par lequel il m’offre de me céder, moyennant six cents livres, tous les exemplaires d’une belle satire où il me déchirait pour gagner du pain, s’appelle La Jonchère[3]. C’est ]’auteur d’un système de finances ; et on l’a pris, en Hollande, pour La Jonchère, le trésorier des guerres.

Je ne peux m’empécher de rire en relisant les lettres[4] de Mannory. Voilà un plaisant avocat. C’est assurément l’avocat Patelin ; il me demande un habit. « Je suis honnête en robe, dit-il, mais je manque d’habit ; je n’ai mangé hier et avant-hier que du pain. » Il fallut donc le nourrir et le vêtir[5]. C’est le même qui, depuis, fit contre moi un factum ridicule quand je voulus rendre au public le service de faire condamner les libelles de Roi et d’un nommé Travenol, son associé.

Voici des lettres d’un pauvre libraire[6] qui me demande pardon ; il me remercie de mes bienfaits ; il m’avoue que l’abbé Desfontaines fit sous son nom un lihelle contre moi. Celui-là est repentant ; c’est du moins quelque chose. Il n’avait pas lu apparemment le livre de La Mettrie contre les remords.

Je trouve deux lettres d’un nommé Bellemare, qui s’est depuis réfugié en Hollande sous le nom de Bènar[7], et qui a fait contre la France un journal historique, dans la dernière guerre. Il me

  1. C’est, dans les Œuvres de J.-B. Rousseau, l’épître vi du livre II.
  2. Il n’est question que de vingt-quatre mille dans la lettre 987 ; voyez tome XXXV, pages 69-70.
  3. Sa lettre est au tome XXIII, page 58 ; voyez aussi XXVI, 140 ; et XXXV, 466.
  4. Voyez tome XXXVI, page 294.
  5. Voltaire exagère ici quelque peu les générosités qu’il avait faites à cet ancien panégyriste.
  6. Jore ; voyez ses lettres, n° 992, 1000 et 1510.
  7. Barbier attribue à ce Bénar l’Éloge de l’enfer, la Haye, 1759.