Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/195

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ACTE I, SCÈNE I. 18 : >

Ils font, en se jouant, et la paix et la guerre ; Du sein des voluptés ils nous donnent des fers. A quels maîtres, grands dieux, livrez-A^ous l’univers M Albine, les lions, au sortir des carnages, Suivent, en rugissant, leurs compagnes sauvages ; , ^Les tigres font l’amour avec férocité :

Tels sont nos triumvirs. Antoine ensanglanté Prépare de l’hymen la détestable fête. Octave a de Julie entrepris la conquête ; Et dans ce jour de sang, de tristesse, et d’horreur, L’amour de tous côtés se mêle à la fureur ; Julie abhorre Octave ; elle n’est occupée Que de livrer son cœur au fils du grand Pompée, Si Pompée est écrit sur ce livre fatal. Octave en l’immolant frappe en lui son rival. <i— Voilà donc les ressorts du destin de l’empire, ’—Ces grands secrets d’État, que l’ignorance admire ! Ils étonnent de loin les vulgaires esprits. Ils inspirent de près l’horreur et le mépris.

ALBINE.

Que de bassesse, ô ciel ! et que de tyrannie ! Quoi ! les maîtres du monde en sont l’ignominie ! Je vous plains : je pensais que Lépide aujourd’hui Contre ces deux ingrats vous servirait d’appui. Vous unîtes vous-même Antoine avec Lépide.

FULVIE.

À peine est-il compté dans leur troupe homicide.

Subalterne tyran, pontife méprisé,

De son faible génie ils ont trop abusé ;

Instrument odieux de leurs sanglants caprices,

C’est un vil scélérat soumis à ses complices ;

Il signe leurs décrets sans être consulté.

Et pense agir encore avec autorité -.

Mais si dans mes chagrins quelques douceurs me restent.

C’est que mes deux tyrans en secret se détestent*.

1. Ce vers célèbre renferme toute l’idée de cette tragédie. (G. A.)

2. Ces vers furent d’allusion sous le consulat Bonaparte, Sieyès, Roger-Ducos. (G. A.)

3. Non-seulement Octave et Antoine se haïssaient et se craignaient l’un et l’autre, non-seulement ils s’étaient déjà fait la guerre auprès de Modène, mais Octave avait voulu assassiner Antoine ; et quand ils conférèrent ensemble dans l’île de Rcno, ils commencèrent par se fouiller réciproquement, se soupçonnant égale-