Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/459

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À Mme Agnant.

Ma voisine, à la fin, vous voilà bien instruite
Que si votre Sophie est par malheur en fuite,
Ce n’était pas pour moi qu’elle a fait ce beau tour ;
Ni vos yeux ni les siens ne m’ont donné d’amour.

MADAME AGNANT.

Mes yeux, méchant !

GOURVILLE L’AÎNÉ.

Vos yeux. C’est une calomnie,
Un mensonge effroyable inventé par l’envie.
Vous en rapportez-vous au bon monsieur Garant ?
Nous l’attendons ici de moment en moment :
Il connaît assez bien quelle est mon écriture ;
Et dans sa poche même il a ma signature ;
Il a jusqu’à la clef de mon appartement,
Où lui-même a laissé tout mon argent comptant :
Il me rendra justice.

MADAME AGNANT.

Oh ! C’est un honnête homme.

L’AVOCAT PLACET.

Un grand homme de bien.

LE JEUNE GOURVILLE.

Chacun ainsi le nomme.

MADAME AGNANT.

Un homme franc, tout rond.

MONSIEUR AGNANT.

L’oracle du quartier.

LE JEUNE GOURVILLE.

Madame, entre nous tous, je veux vous confier
Quelle est à ce sujet ma pensée.

MONSIEUR AGNANT., en buvant, et le regardant ensuite fixement.

Oui, confie.

LE JEUNE GOURVILLE.

Je crois que c’est chez lui que la belle Sophie
A couru se cacher pour fuir votre courroux,
Et pour qu’il la remît en grâce auprès de vous :
Dans toute la paroisse il prend soin des affaires,
Très charitablement, des filles et des mères.

MADAME AGNANT.

Vraiment, l’avis est bon.

LE JEUNE GOURVILLE.

Mademoiselle Agnant