Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/546

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Notre culte est le sien ; je réponds de son zèle ;
C’est un frère, à ses yeux nos cœurs peuvent s’ouvrir ;
Dans celui d’Iradan n’as-tu pu découvrir
Quels sentiments secrets ce Romain nous conserve ?
Il paraissait troublé, tu t’en souviens ; observe,
Rappelle en ton esprit jusqu’aux moindres discours
Qu’il t’aura pu tenir, du péril où tu cours,
Des prêtres ennemis, de César, de toi-même,
Des lois que nous suivons, d’un malheureux qui t’aime.

ARZAME

Cher frère, tendre amant, que peux-tu demander ?

LE JEUNE ARZÉMON

Ce qu’à notre amitié ton cœur doit accorder,
Ce qu’il ne peut cacher à ma fatale flamme
Sans verser des poisons dans le fond de mon âme.

ARZAME

J’en verserai peut-être en osant t’obéir.

LE JEUNE ARZÉMON

N’importe, il faut parler, te dis-je, ou me trahir ;
Et puisque je t’adore, il y va de ma vie.

ARZAME

Je ne crains point de toi de vaine jalousie ;
Tu ne la connais point ; un sentiment si bas
Blesse le nœud d’hymen, et ne l’affermit pas.

LE JEUNE ARZÉMON

Crois qu’un autre intérêt, un soin plus cher m’anime.

ARZAME

Tu le veux, je ne puis désobéir sans crime…
J’avouerai qu’Iradan, trop prompt à s’abuser,
M’a présenté sa main que j’ai dû refuser.

LE JEUNE ARZÉMON

Il t’aimait !

ARZAME

Il l’a dit.

LE JEUNE ARZÉMON

Il t’aimait !

ARZAME

Sa poursuite
A lui tout confier malgré moi m’a réduite ;
Il a su le secret de ma religion,
Et de tous mes devoirs, et de ma passion.
Par de profonds respects, par un aveu sincère,